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A travers l’Écosse

mardi 30 mai 2017

Quel déploiement d’architecture, de toutes parts ! Dans cet unique vallon, qui contient à lui seul l’essentiel de l’activité de la ville, se tiennent côte à côte ou les uns derrière les autres tous les styles du globe. Ils suivent la dénivellation du sol : temples égyptiens ou grecs, palais vénitiens, flèches gothiques, agglutinés dans un désordre qui fait l’admiration unanime ! Coiffant et dominant le tout s’élèvent les masses épaisses du château et le sommet du Siège d’Arthur d’où l’on peut plonger un regard méprisant sur ces imitations avec une dignité pleine de componction. Car – c’est vrai – la mère Nature produit des Å“uvres qui peuvent regarder de haut les monuments de notre Art ; néanmoins, il faut bien dire que cette Nature est une protectrice douée de moins de discernement que ce que l’on pourrait croire et un contraste criant ne l’effraie nullement. Les oiseaux nichent aussi bien dans des châteaux de style corinthien que dans n’importe quelle fissure d’un simple rocher ; la même atmosphère et une lumière identique baignent le roc éternel ou l’invitation fugace d’un portique.

(…)

Conformément aux règles du plus pur romanesque l’endroit exige d’être à demi-déserté et penche vers le déclin, ouvert avec largesse à une profusion d’oiseaux, aux jeux du soleil et du vent ainsi qu’à quelques gitans qui campent dans la proche banlieue ; mais les citoyens de la ville, avec leurs fiacres et leurs tramways, leurs trains et leurs affiches, se tiennent indifférents, en dehors de tout cela. Semblables à des touristes qui seraient venus là en voyage organisé, ils se désintéressent complètement du contexte historique qui les entoure et traînent derrière eux leur progéniture au milieu des sites les plus pittoresques, et ce dans l’indifférence la plus totale.

Robert Louis Stevenson, À travers l’Écosse, Édimbourg de ma jeunesse

lu par Marie-Lo

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