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Le garçon

jeudi 17 août 2017

9. Je n’aime plus aller à la plage avec mes parents. Je voudrais rester près des tables de ping-pong. Le temps est long sur le sable. Je n’ai plus envie de jouer au ballon avec mon frère. Ni de chercher des coquillages. Je deviens pénible. Ma mère ne supporte pas mon humeur. Elle demande quelle est cette nouveauté.

10. Je parle peu, je lève les yeux au ciel, je ne nage plus jusqu’au ponton. Je ne plonge plus. Je ne me bats plus avec mon frère pour avoir le masque et le tuba. Je reste allongée sur ma serviette, sur le dos, puis sur le ventre. Quand je mets un pied dans l’eau, je la trouve glacée, je déteste mon père qui m’éclabousse soudain. Je pousse des cris, je me mets en colère.

11. Je deviens mystérieuse et susceptible. J’éloigne un peu ma serviette pour ne pas entendre les conversations.Je bronze et c’est tout ce qui importe. Je prends soin que les bretelles de mon maillot de bain ne laissent pas de marque. En quelques jours, le monde se rétrécit, me vrille, m’étrangle. Je suis bientôt asphyxiée. Je ne sais pas apprivoiser le bouleversement qui s’empare de moi. J’emprunte le miroir de poche de ma mère et vérifie plusieurs fois dans la journée que mon teint embellit. Je n’ai plus l’esprit libre. L’existence du garçon me paralyse.

Brigitte Giraud, Avec les garçons (Baby foot), 2010

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