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22 mars

jeudi 26 mars 2020 - Ce qui nous empêche

Ce soir les feux d’artifices sont verticaux, au ciel on les voit, et à 20h. Quelqu’un a briefé les tireurs ?

Les voitures passent, petites citadines des infirmières, plus grosses berlines, voire SUV, des médecins ; j’imagine, je construis ma fiction routière depuis ma fenêtre. La camionnette "Urgence sang" qui passe régulièrement, dans un sens, dans l’autre, plusieurs fois par jour. Quelquefois un scooter. Que livre-t-il ?

Imaginer l’après, espérer que ça aura changé les consciences. Que la ville silencieuse où les oiseaux chantent et les enfants respirent restera silencieuse et respirable, que les véhicules n’y circuleront plus jamais, que les usines ne tourneront plus jamais à produire ces inutiles polluants. Espérer que tout le monde sera de cet avis, de donner l’argent public aux médecins, aux chercheurs, aux hôpitaux, de donner ce qu’ils demandent sans poser de question, arrêter de sauver le système en le détruisant, virer les comptables de l’exercice de l’État. Espérer que tout ce qui a de l’importance en ces jours où il ne reste que l’essentiel, des sciences aux arts, de la solidarité à la l’écologie, que tout cela restera quand on aura recouvré liberté et santé ; et que le nuisible qui est à l’arrêt aujourd’hui disparaîtra. Et puis se dire que tout ça peut aussi se retourner contre nous bien sûr. Qui est au Pouvoir reste au Pouvoir et va abattre sa massue comme toujours, continuer, ils vont continuer ; donc pas vraiment "se retourner", mais continuer. Démonter l’assurance chômage, flexibiliser le temps de travail, en finir avec les régimes spéciaux, toujours plus d’argent aux entreprises et toujours moins aux travailleurs, loi du plus fort, individualisme tout cela, on le voit, continue déjà. Les éléments de langage LREM, entre guerre et économie, s’attardent sur ces mots, soulignent l’économie vitale du pays, refusent le confinement total, absolu, pour ne pas enrayer l’économie, c’est dit, parce que c’est la guerre, l’exception, et pour s’en remettre après, Monsieur le Président est prévoyant, parce qu’il pense à l’après mais après il sera trop tard toujours et lorsqu’il vendra ses réformes ce sera facile parce que l’économie malgré tous les efforts s’en sera pris un coup et qu’il faudra faire des sacrifices pour sauver le système, parce que ça doit continuer à tourner comme avant.