exercice de style* – une histoire policière : un transfuge
l’homme et la couleur de peau – le réalisateur et l’acteur – le policier et l’agent double : le voyou – les gangs (le transfuge a teint pour moitié, donc, ses cheveux en blond, troisième plan dans l’image)
les coins de rues (droite cadre c’est lui)
les groupes et les fraternités sauvages, des hommes et des coups (battes de baseball ou batte de cricket ?)
j’ai cru comprendre qu’il s’agit d’un trafic d’êtres humains – comme dans toute société (probablement) il y a un chef, on peut même lui laver les cheveux
au dessus de la gare du Nord, à Paris, dans le dixième arrondissement, bordé par le métro aérien – la ligne fait Nation-Porte Dauphine par Barbès et Étoile – là, non loin de cette officine dont j’affectionne particulièrement l’enseigne
même s’il s’agit d’une fiction, les lieux sont là et parlent d’eux-mêmes – plus ou moins
on attend le(s) client(s) – il(s) vien(nen)t
puis d’autres
il se pourrait cependant que les choses se gâtent
la place du traître (mais à qui ?) n’est pas spécialement enviable
alors après il ne s’agit pas de divulguer, ou de montrer des actions délétères ou simplement débiles
une famille, voilà, on est désolé
mais on passera par là
jolie, je ne suis pas certain
mais une histoire, des exilés, des perdus honnis et haïs sans doute oui
pas certain que ça finisse bien…
(* : avertissement : je me suis emparé du film annonce de ce film, intitulé Little Jaffna, son réalisateur Lawrence Valin y tient le rôle principal – il en est aussi le scénariste, entre autres (j’apprécie particulièrement cette façon de créditer une demi-douzaine de scénaristes) – sans doute dire qu’il s’agit d’un premier long métrage et que c’est à ce titre qu’on le salue aussi) (renseignements pris (on tient les articles (3 quand même) du canard à la disposition de celles et ceux qui en auraient le besoin), un premier court-métrage a été réalisé et produit dans le cadre de la Résidence de la Fémis (en 2017…) – probablement sur le même thème : ici une image de ce tournage particulier
pas vu non plus – c’est en quoi cette expérience cinématographique tient en quelque sorte d’une espèce de poésie – je brode – mais c’est que le circuit dans lequel est proposé ce film m’est particulièrement odieux. L’envie y était cependant. J’attends donc de voir le dvd s’il se peut – ou une autre programmation, ailleurs. Ici donc un prototype qui tenterait de se rapprocher d’un livre dont j’avais beaucoup aimé le titreComment parler des livres qu’on n’a pas lus (dans mon ignorance, je pensais que l’auteur avait gardé le singulier (euh pas lu non plus…)
de dos, photo prise (dit-on) par Constantin Costa-Gavras, Chris Marker qui filme la place Rouge. « Ce que je remarque (dit la réalisatrice, en voix off) (mais moi aussi) c’est que Chris a les oreilles décollées ». Oui. Comme son cousin Jenry. Oui. Moi aussi. Comme mon père…
(l'affaire est ambitieuse - ce sont des choses qui vous font battre le cœur - je dispose après vision et re-vision(s) du film (de télévision sans doute) de plus de soixante-dix vidéo-grammes - comme on dit photogrammes pour le cinéma : ça fait beaucoup - il y a du tri à faire - de la présentation - et aussi quelque chose qui me rappelle les billets posés dans la maison[s]témoin au sujet de l'hôtel de Suède (et sa chambre 12) ici le premier et là le deuxième) (j'explore en quelque manière les débuts des miennes sympathies pour le cinéma dont j'espère qu'elles seront partagées)
L’histoire est partie de ce générique
qu’on ne lit que très mal (je ne le réécris pas : ça sert à quoi, de divulguer les patronymes ? quelque chose du judiciaire ? ) – c’est celui d’un film intitulé Le 5° plan de la Jetée réalisé par Dominique Cabrera (2024) (on peut toujours l’y voir) (évidemment le lien n’est pas destiné à durer mais on s’en fout). Je l’ai vu dans le poste (il faudrait s’intéresser à ses conditions sociales de production, au moins les déterminer et les identifier – arte est dans le coup, certes). Il s’appuie sur cette image
trois gens de dos (en vrai, il y a aussi gauche cadre la dame en fichu (je verrais bien Gena Rowlands) mais elle passe) – le petit garçon aux oreilles décollées se reconnait soixante ans après (à l’image ici : Jean-Henri (aka Jenri) et sa fille Mathilde
) il était sûr qu’il s’agissait de lui : Chris Marker, faisant des photographies sur la jetée (c’est cette espèce de terrasse ouverte au public – fermée de nos jours) d’Orly (l’aéroport, ce jour-là, d’octobre 1962 ou septembre… ) et eux regardant les arrivées des avions en provenance d’Algérie ou d’ailleurs (la guerre avait cessé en mars de la même année, et la paix garantie par les accords d’Evian – 18 mars 1962). Les enfants étaient revenus (ils les avaient laissés un moment (probablement entre Pâques et septembre 1962) aux soins des grands-parents en Algérie (à Oran crois-je comprendre) – les enfants étaient trois : il y avait Jean-Henri, il y avait Polito et il y avait Julia), les parents et eux se promenaient ce dimanche-là (et assez souvent les dimanches de cette fin d’été 1962) à Orly et Marker passait par là. Sans doute ou probablement, tout est là. Des pieds noirs comme on disait. Pour bien commencer à se rendre compte de ce dont il s’agit : sur l’image de ce cinquième plan, figure(raie)nt donc la mère (Angèle de son prénom) , le père (Julien) et Jean-Henri (l’un de leurs trois enfants) – hors champ, sans aucun doute, les parents Cabrera (et leurs deux enfants) : les cousins sont donc, Dominique et Thierry, dont la mère se prénomme Monique (leur père est décédé, il se prénommait Tony (on le verra à l’image : ici avec sa femme (Monique donc), dans ces années-là-sur le pont des Arts
), il avait deux frères, José et Raymond qu’on ne verra pas) – ici les voici qui arrivent au studio (intitulé L’Etna)
Dominique, à droite, la réalisatrice du film va montrer les images à sa mère Monique, au centre -son fils (et le frère de Dominique) Thierry, gauche cadre, est là aussi – il donnera son avis.
De cette image part donc le film qui recherche qui cherche qui tente de trouver et de prouver ou de retrouver la réalité des choses, soixante ans après – émaillé de photogrammes du film en question ( La Jetée (Chris Marker, 1962) donc) mais aussi d’autres comme Le Joli mai (du même en 1963,tourné en 1962 – dont le générique a été chroniqué ici) , puis Sans soleil (1983) puis aussi Level Five (1997). On redécouvre le réalisateur on le voit parfois à l’image (lui qui détestait qu’on le prenne en photo, qu’on le filme, qu’on l’interroge) – ici qui tient la caméra, c’est lui, c’est l’Ombre
(le défilé est celui du 13 février 1962, celui des huit morts de Charonne (dont Fanny Dewerpe) – huit morts par la grâce du préfet Papon, et de ses sbires lâchés en ville…) : ce jour-là, dit-on, on entendit des oiseaux chanter sur la place de la République où passaient le cortège – on voit parfois simplement son ombre
(et l’une des intervenantes, dont je n’ai pas réussi à déterminer l’identité indique qu’il se faisait appeler L’ombre… ) elle est ici à l’image
Ainsi ce film-ci convoque-t-il des acteurs (au sens sociologique – au sens cinématographique aussi) de ces films – des femmes surtout – qui connurent le réalisateur, jouèrent avec (et pour) lui. C’est parce que l’identification au générique de qui est qui m’a interrogé disons que j’ai pris des images. Des images du film de Dominique Cabrera, laquelle fait consulter des images : des photos, des photos des films, des films de Chris Maker mais aussi de sa propre famille pour en faire elle-même un film que j’ai regardé et dont je retranscris ici la mémoire. C’est un peu lyrique et c’est presque sacré – c’est peut-être une galerie de portraits, c’est peut-être juste pour le souvenir – juste me souvenir
Puis, ici voici Julia : elle semble reconnaître les trois personnes/personnages/acteurs, c’est bien son frère son père et sa mère, oui
puis voici Polito
pour lui non plus il n’y a pas de doute – et puis La Jetée entre dans le jeu – comment savoir quand la photo a été prise ? Il est a été dit, sans doute par Chris Marker lui-même, que les images et le tournage avaient été effectués durant l’année 1962, mais plus vers le début. On interroge d’abord Pierre Lhomme (très souvent chef-opérateur mais ici co-réalisateur du film Le Joli Mai (« premier printemps en temps de paix » indique la voix off (Yves Montand)) (on le voit ici qui ouvre les bras
) il indique au téléphone que les images ont dû être prises à un autre moment, peut-être vers septembre octobre (« à l’automne 62 » dit-il) – c’est une première piste – on interroge alors l’assistant de Chris Marker, Pierre Grunstein
qui indique que oui, c’est tout à fait possible que Marker ait fait ces photos-là de la Jetée à ce moment-là d’automne 62 – et oui on lui demande s’il reconnait sur cette image du Joli Mai
peut-être est-ce Hélène Chatelain, la femme de la Jetée – sans doute sûrement… Elle et Davos Hanish, l’homme qui voyage dans le temps… Le Paris du Joli Mai c’est le Paris de l’arrivée des Cabrera comme des Bertrand , le temps de l’exil… Puis on interrogera la fille de Pierre Joffroy (l’acteur qui porte des lunettes – le tueur :
) elle a conservé ses carnets et agendas (en fait, Pierre Joffroy est un pseudonyme, il se nommait Maurice Weil, sa fille est donc sans doute Ariane Weil : c’est elle
)- pochettes grises, classées – on découvre qu’il a effectué son rôle donc de fin septembre (le 29) à début octobre (le 3) 1962 – « il comprit qu’on ne s’évadait pas du temps » dit la voix off de La Jetée – on y lit aussi que Davos était un peintre en réalité – on convient que les coïncidences s’accumulent un peu – et puis et puis… Monique regarde, ne voit rien, ne reconnait personne
et ici toute la famille Cabrera (Dominique est hors-champ, juste là)
Puis on interrogera la femme de Davos
qui repense à ce garçon, elle ne vint pas au tournage – Jacquie… Jacquie Bablet donc –
et on apprend que Davos était juif – pour elle, ce n’est pas possible que Davos ressemble à son cousin aujourd’hui – non et pourtant on découvre que Davos est né dans le même village (Sig, Saint-Denis du Sig alors) que la famille de Monique (épouse) Cabrera – ce n’est pas possible… Voici Davos alors
il a quarante ans – David Bou Hanish, c’est son nom – né à Saint-Denis du Sig, en Algérie – comme la famille Cabrera… Puis viendra la révélation (vaguement, troublante, impossible) : Monique se souvient des Bouanish – un hasard extraordinaire, « ah ben dis donc » dit Monique… « On en connaissait des Bouanish, Angèle elle en parlait oui, on disait les Bouanish comme on disait les Cabrera… »
« et Angèle elle était amoureuse d’un des Bouanish… » et tout le monde le lui a interdit, David n’était pas un bon parti (parce qu’il était juif…) « un traîne-savate » disait leur père – « un bon à rien : la preuve, il est devenu acteur… « dit Monique. Tout cela donne le tournis, dit-on – comme un vertige « Comme Vertigo (le film d’Hitchcock), comme si Hélène et Davos étaient comme les double de Scottie et Madeleine… Vertigo… Où le vertige de l’espace est en réalité le vertige du temps… »
Puis voici Denis Gheerbrant qui détaille le plan animé (le seul) dans La Jetée
la fin, le plan du regard – « l’instant qui lui avait été donné devoir, c’était celui de sa propre mort… » On interrogera ensuite cette dame, là
(elle dit de Chris Marker qu’ « il aimait passionnément l’aube… ») (moi aussi) Florence Delay – qui avait joué Jeanne d’Arc pour Bob Bresson – elle qui fit la voix off de Sans Soleil… car Bresson lui avait appris à dire, à dire sans nuire à l’image… « Le bonheur pour Marker ? Un visage de femme endormie » dit-elle.
Circulations souterraines, généalogie des images… Ici Maroussia Vossen (« Chris m’a montré ce film quand j’avais 7 ans… »
non, il ne m’a jamais rien demandé… jamais Chris maman et moi ensemble – jamais… »
« vraiment la personne qui avait une figure de père… ») et elle s’en va Autre chose encore, voici Étienne- Étienne Sandrin, acteur réalisateur (éleveur de Champagne dit l’Internet)
dans la compagnie des fantômes… On arrivera encore à reconnaître Catherine Belkhodja
dont la famille rentrait en Algérie quand celle des Cabrera s’en allait…
(si Marker fit La Jetée avec Hélène Chatelain, il fit Level Five (1997) avec elle – actrice, réalisatrice reporter téléaste – la voici plus jeune
puis on entendra Hélène Chatelain nous dire « c’est un très joli mot, la métaphore… » – la voici, plus tard
et puis, pour finirune dernière image
l’exil – Orly – on se souvient, on pense à Hélène, à Davos, à Chris… De profil, oui, c’est bien elle, c’est Angèle…
Fort beau film. Pour finir peut-être, Orly, cette petite ville de banlieue où s’installait à la fin du dix-neuvième siècle de cette ère
une aérogare : ce toponyme a été réduit
et Chris Marker est (dirait-on) un nom d’emprunt – ici la (une) liste de ses hétéronymes
alias Christian Hyppolyte François Georges Bouche-Villeneuve…
Le Cinquième plan de « la Jetée » un film de Dominique Cabrera.
entre ici - comme disait l'autre - mais abandonne tout espoir d'un billet post chronique critique ou quoi que ce soit d'autre de l'ordre de l'efficace ou de la vitesse prêt-à-porter ou penser - on n'a pas envie de s'amuser
On n’a pas envie de s’amuser avec ces affaires-là mais ça ne les empêche pas (malheureusement sans doute) d’exister. Je poserai (sans autorisation ni demandée ni accordée) la tribune publiée dans le canard ces jours-ci par Pinar Selek (dont on sait qu’un pouvoir voisin cherche à effacer et la trace et la vie) . On sait aussi que les deux réalisateur.es de ce film sont en but à toutes les turpitudes d’un même pouvoir dans un autre pays (mais cette gale semble s’étendre ici et partout) : je pose leur image, pour ne pas oublier.
Une image du dossier de presse (parfois, je me demande à quoi peut bien servir le cinéma : ici, pour une fois – mais c’est quand même aussi toujours le cas – pour que leur existence même soit défendue – et leur droit à vivre et travailler) : (sic) Maryam Moghaddam est née à Téhéran. Actrice, scénariste et réalisatrice, elle est diplômée de l’école des arts du spectacle de Göteborg, en Suède. Elle s’est produite dans divers théâtres suédois et a joué dans des films iraniens tels que PARDÉ (2013) de Jafar Panahi et Kambuzia Partovi, Ours d’argent lors de la 63e édition de la Berlinale. Behtash Sanaeeha est né à Shiraz. Après avoir obtenu son diplôme d’architecte, il écrit des scénarios et réalise des courts métrages, des documentaires et des publicités. Son premier long métrage RISK OF ACID RAIN (2015) est programmé dans plus d’une trentaine de festivals internationaux.
Ce n’est pas le lieu, mais ce ne sera pas non plus le silence : le film dont on parlera est sorti ici il y a quelques mois, depuis les réalisateur.es, les actrices et les acteurs aussi sans aucun doute, sont harcelés (le mot n’est pas usurpé, pour une fois) par un pouvoir religieux et borné (lapalissade) (de l’autre côté, il ne l’est pas moins : la plus grande démocratie du monde est elle aussi sous la coupe de fous (très souvent masculins, certes) élus cependant – les conditions des élections sont de plus en plus soumises à caution… mais dans les années vingt et trente du siècle dernier, ce sont les urnes aussi qui portèrent au pouvoir les plus odieux personnages…) Ce n’est pas le lieu, mais où serait-il donc, alors ? c’est trop ambitieux me dis-je. Tant pis.
Téhéran donc, une veuve cherche de la compagnie – celle-ci s’enfuit
elle se promène dans un parc s’arrête s’assoit
on arrête une jeune fille aux cheveux roses
(si je regarde le « gardien de la révolution » (en uniforme, galonné, emberetté, ordinaire) je vois aussi sa substitute à l’index levé – et je pense à Evin et à Fariba Adelkhah)
mais elle n’a pas peur – la jeune fille est enlevée (on pense à Mahsa Amini (et à tant d’autres) : le film a été tourné avant) son amie s’en ira
(non, jamais…) ainsi notre héroïne s’en va (Lily Farhadpour) – un restaurant réservé aux anciens soldats (elle a hérité de son mari le droit de s’y nourrir) – seule : mais y déjeune un chauffeur de taxi (c’est une histoire simple
d’amour, si tu veux)
Alors on se présente
et puis
(interprété par Esmail Mehrabi) ce sont de vieilles gens (dans les soixante-dix), lui travaille encore – il la raccompagne donc, il pleut quand il passe par une pharmacie
elle lui propose de rentrer chez elle (quelque chose d’assez rare, difficile, audacieux : presque un scandale… et pire 🙂 il accepte
elle en est heureuse, lui offre à boire – il accepte encore
mais une voisine survient (qui surveille, ainsi que la femme en noire qui tout à l’heure qui levait l’index)
et elle ment, Mahin, et sans la moindre honte : peu importe – l’autre s’en va – et les deux vivent s’amusent rient dansent
boivent – on fait même un selfie
ils boivent encore, trinquent, mangent – s’amusent donc, se mettent à danser
et puis puisque c’est fatigant, qu’il fait chaud, que le vin aide à faire monter la température
et que les esprits s’échauffent
on se retrouve sous la douche – et puis et puis on parle et on se livre
la cuisine et la pâtisserie donc, comme promis
et mettre à cuire
Le film s’achève.
Mon gâteau préféré, un film qui nous vient d’Iran, réalisé par Maryam Moghaddam et Behtash Sanaeela
Je fais suivre ici cette chronique en date du 7 avril 2025, qui nous parle de ce que subissent celles qui tentent de vivre librement
Dans une tribune au « Monde », la sociologue turque alerte sur le sort de trois militantes condamnées à mort par le régime de Téhéran.Pinar Selek : « Agissons pour empêcher l’assassinat de trois féministes iraniennes »
Il faut agir de toute urgence pour empêcher l’assassinat de prisonnières et de prisonniers politiques en Iran. Récemment, les recours contre les condamnations à mort de trois féministes – Pakhshan Azizi, Sharifeh Mohammadi et Varishe Moradi – ont été rejetés. Leur exécution est imminente. Les bourreaux se tiennent prêts. Cela peut survenir à tout moment.
Parmi elles, Varishe Moradi, féministe kurde incarcérée à la prison d’Evin, est dans un état de santé alarmant. Blessée au combat contre Daech [acronyme arabe de l’organisation Etat islamique], elle porte encore dans son corps des éclats d’obus qui lui causent d’atroces souffrances. Jamais soignée, elle est abandonnée à la douleur par un régime qui la punit pour avoir résisté à la barbarie islamiste. Son état s’est récemment aggravé, au point que les autorités ont dû la transférer à l’hôpital. Les médecins de l’hôpital, comme ceux du dispensaire de la prison, ont confirmé qu’elle avait un besoin urgent d’examens, de soins et d’opérations. Pourtant, tout traitement lui est refusé. Elle reste privée de soins médicaux et de médicaments.
A travers le corps des femmes, le régime répressif vise le mouvement Jin, jiyan, azadî (« femme, vie, liberté » en kurde), déclenché en 2022 par la résistance et l’assassinat de Jina Mahsa Amini et porté par les sorcières contemporaines : celles qui dansent sous les balles en proclamant l’urgence de la liberté, de la laïcité, de la démocratie et de la justice sociale.
Le miracle de la solidarité
Pour étouffer ce soulèvement, le régime iranien déchaîne une violence arbitraire contre toute la population, visant en premier lieu les femmes. Celles qui veulent la liberté. Celles qui osent. Et il s’alimente des ombres de tous les fascismes – de Kaboul à Washington, de Budapest aux murs qui se dressent contre les exilées et les exilés. Ces régimes, qu’ils brandissent religion, tradition ou nationalisme, savent que le privé est politique. Et que sans féminisme, il n’y a pas de lutte efficace contre les fascismes.
Il nous faut faire preuve d’une audace collective. Pakhshan, Sharifeh et Varisheh n’attendent pas seulement la mort. Elles attendent aussi, avec un demi-espoir, le miracle de la solidarité.
Comme le disait Hannah Arendt (1906-1975) : « L’être humain possède manifestement le don de faire des miracles. Ce don, nous l’appelons dans le langage courant agir, qui signifie la capacité de déclencher de nouveaux processus. » Elles attendent de nous tous que nous réunissions nos forces. Applaudir ne suffit pas. Evoquer leurs souffrances ne suffit pas. Ne restons pas de simples témoins d’un crime annoncé, soyons les artisans d’un miracle. Nous avons la responsabilité d’intervenir pour empêcher ce crime.
Si, aujourd’hui, la communauté internationale, les organisations de défense des droits humains et toutes les personnes éprises de justice élèvent leur voix et agissent sans délai, ces assassinats peuvent être empêchés. Demain sera trop tard. Il faut agir pour la vie. Jin. Jiyan. Azadî.
Pinar Selek est une sociologue, écrivaine et militante féministe turque, maîtresse de conférences à l’université de Nice Côte d’Azur. Elle a dernièrement publié Le Chaudron militaire turc (Editions des femmes, 2023).
les deux réalisateur.ices et les jeunes filles en répétition
le film (il s’agit d’un documentaire) se déroule ici
un petit bourg du centre de l’Egypte – elles sont six jeunes filles qui vivent
et veulent vivre libres – autant dire tout ou presque s’y oppose – mais il y a le théâtre et la joie d’être ensemble
Lorsqu’on regarde ce que disent les cartes de gougeule (la firme qui s’avilit dans le golfe du Mexique) on ne trouve que cette image de ce lieu
une image posée là par un individu (et non par la firme) : le monastère copte de la petite ville – car la religion est présente elle aussi – une autre contrainte qui s’oppose à la liberté de penser et de vivre heureuse… – alors, avec la force de caractère d’une d’entre ces filles
elles réalisent des scènes de théâtre dans les rues du village
et mettent en scène les obligations qu’elles subissent – le mariage forcé, la tenue vestimentaire et d’autres choses encore
quinze ans seize – on les suit
d’abord en représentations : la vie, la joie exister vraiment sans doute
dire ce qu’elles sont et ce qu’elles pensent – le film est réalisé par deux cinéastes qui suivirent ces jeunes filles durant quatre ans, dit le dossier de presse – et nul doute que la présence même de ces deux cinéastes et de l’équipe
fut d’un grand secours pour la troupe – on entend dans la foule du public quelques insultes parfois – elles jouent, rient s’amusent et chantent – la vie continue, on en suit plus particulièrement trois:
l’une d’entre elle
déclare cette profession de foi
mais se mariera
puis aura un enfant – la seconde
voudrait vivre un grand amour
et puis celui qu’elle choisit la cloîtrera (son père dont je ne possède pas d’image tentera de la raisonner (disons) sans y parvenir) – la troisième enfin
parviendra (en se cachant presque (notamment de son frère aîné qui ne cesse de la rabaisser) , en n’avertissant pas ses parents) à partir
par la force de sa volonté –
Le fleuve
la campagne profonde
et six jeunes filles aux destins presque tout tracés…
Pourquoi les deux ensemble je ne sais le dire - en vrai j'en fais un ici, un autre là - les questions posées sont (comme dirait le contemporain) obsolètes.
ça risque d'être un peu compliqué mais ça n'a pas non plus une importance capitale : des images d'un journal attachées à une recherche sur un film qui m'a plu - une région, une femme que beaucoup de choses empêchent - une expérience, disons...
mais quelque chose du populaire, du prolo, de celui et celle qui n'ont hérité de rien d'autre que de leur corps et pour survivre, il le leur faut...
et donc d'abord des images (onze) de ces mondes un peu perdus de vieilles gens qui vivent parfois seul.es puis ensuite (expérience : on verra ce que ça "donne") le film dont il sera question (qu'en termes truistiques ces choses-là sont dites)
Il s’agit d’une région de l’Espagne – c’est l’océan qui la borde, et elle a vu naître Maria Casarès. Dans ces conditions, elle m’attire ou me plaît – en haut, à gauche – nordeste – le film s’y déroule, j’ai cherché quelques images et je suis tombé sur celles-ci que je pose un peu (sûrement sans le droit de le faire – osef grââââvement)
je ne mixe pas comme j’en avais l’intention – des images signées, qui datent d’un an comme le film (en fait sortie en France le 3 juillet 2024)
quelques dizaines de kilomètres au sud et c’est le Portugal
pommes de terre – ruines
feux
geste votif – les traces de l’existence, sur l’envers de la photo –
commune de Friol – à l’abandon
magnifique
mais où vivre sinon
on le voit, c’est la montagne,montagnette peut-être même (j’ai pensé au Morvan)
Cependant Ramona elle vit en bord de mer – elle y travaille, dur, d’arrache-pied même – une fille qui n’est pas l’enfant de l’homme avec qui elle vit, une fille qui s’en va – et qui envoie paître son travail mal rémunéré, repris par un avide – elle cherche, énervée -va ici ou là…
La suite, disons, se trouve sous le lien, en début de billet. sur ou avec et pendant Matria un premier long métrage réalisé par Alvaro Gago
une de mes connaissances que j’ai perdu de vue, mais croisé lors d’une manifestation contre la réforme des retraites, ne l’appelait que Constantinople. Il n’était pas question d’user d’un autre toponyme – ici, dans ce film titré Crossing Istanbul tout commence de l’autre côté de la mer Noire – à l’est, c’est en Géorgie (à la vitesse de ces jours-ci on y tue et on y inflige des coups, tous les soirs, tous les soirs: je me souviens de Constantinople, oui) – la ville de départ se nomme Batoumi et ça se présente comme ça
suggestif hein – ça ressemble un peu, ici vue de la côte asiatique (en amorce, à droite), à la ville d’arrivée
là européenne
à Istanbul, une des plus grandes et des plus belles villes du monde
et qui, dans ce film, tient la place d’un premier rôle – deux personnes, l’une assez âgée (elle a mon âge, t’as qu’à voir), Lia
l’autre, Achi, un jeune type assez sympathique
je recommence au début : Lia (Mzia Arabuli dans le rôle de la prof retraitée : magique) vient de subir un deuil : sa sœur vient de mourir, laquelle lui a fait promettre de retrouver sa propre fille, Tekla, disparue – en réalité Tekla a (peut-être) désiré changer de sexe et s’est enfuie depuis quelques années – Lia la recherche dans une espèce de banlieue de Bantoumi où vit Achi (Lucas Kankava) qu’un de ses frères tolère – on ne connait guère la fille que Lia recherche, elle vivait peut-être à côté « chez les trans »… Alors Lia s’en va
Achi lui court après : si lui il sait où se trouve la nièce de Lia, il ne voulait pas en parler devant son connard de frère parce que ces histoires de transsexuel.les… hein… mais c’est à Istanbul…
Lia ne le croit pas – il insiste – très bien, dit-elle, tu viens avec moi… Il n’y croit pas, mais si… et les voilà partis (en autobus) arrivent en Turquie (ça ne change pas grand chose…) puis à Istanbul – bateau 1
ils cherchent – bateau 2 – un épisode veut que Lia et Achi non encore devenus assez amis, soient invités à manger au restaurant par des Géorgiens
cet épisode devient une source de joie, alors on danse
mais la réalité revient : ils recherchent, cherchent Tekla sans la trouver – la réalité c’est qu’Achi a menti, il ne sait pas où se trouve la nièce de Lia –
ils cherchent – et puis encore
en ville – des péripéties certes, mais dans le même temps (ce cinéma-là est du beau cinéma, des histoires parallèles entremêlées, compréhensibles et sensibles, dans un même temps une même ambition, un même décor et un même affect) entre en scène Evrim (Deniz Dumanli, adorable) : elle est (assez récemment) devenue femme et avocate, notamment de transexuel.les
Evrim joue le rôle de la fée dans les contes (belle, compréhensive, dévouée, joyeuse et heureuse…) amicale
quelque chose de la belle vie – bon, évidement dans le contexte et l’univers (et notamment la société civile turque, machiste et bornée) dans lequel elle vit, c’est assez difficile – mais elle aidera Lia qui a des difficultés
qui ne retrouve pas sa nièce – Istanbul est trop grande trop étendue « je crois que c’est une ville où on vient pour disparaître » dit un dialogue – est-ce vrai ?
des péripéties : elle recontrera Evrim qui l’aidera
demandant à ses connaissances
permettant à Lia de rencontrer des « amies » de sa nièce
laquelle a disparu semble-t-il (ce n’est pas que ces « amies » soient souteneures, mais enfin qui peut savoir ? on le présume) – et Lia de chercher encore…
et puis et puis – des coups de cinéma (comme on dit des coups de théâtre) qu’on laissera découvrir – tenir ses promesses
je ne sais pas, mais en tout cas, pour le film, et pour le cinéma : c’est oui
Crossing Istanbul un film (suédois…) vraiment bien – réalisé par Levan Akin
voici un type (un anglais, un diplomate, un fiancé) (Edward Abbott, tel est son nom – Gonçalo Waddington)
tout droit sorti d’une nouvelle de Somerset Maugham (je l’aime beaucoup, » et mon fantôme (d’ailleurs) en rit encore ») – il est là, sous la pluie à attendre le bateau qui mène vers lui sa fiancée – mais non, il s’enfuit – en train, qui déraille
il fuit – il ne veut plus se marier, dirait-on – jungles villes transports – il fuit – des images magnifiques – des paysages (qui n’existent que parce que nous les contemplons, certes) : tout n’est qu’illusions tu sais – il y a de nombreuses étapes, on les emprunte, on suit le chemin – l’homme, lui, s’enfuit – le film est peut-être construit en deux parties, hétérogènes, c’est possible – une comédie, un mélodrame… – au bout d’une heure (des villes, des gens, des campagnes, des arbres et des fleurs sans doute) elle arrive
(Molly Singleton, interprétée par Crista Alfaiate) et lui disparaît – elle, elle suit le chemin qu’il a emprunté voilà quelques jours peut-être
le monde bouge comme le temps
courtoise, drôle, (son rire quand elle pouffe…) adorable pour qui la croise – mais elle, toujours à la recherche de son fiancé
on assiste, tout le temps que dure le film, à des va-et-vient chronologiques, on est au début du vingtième siècle et tout à coup
au vingt-et-unième, aujourd’hui des rues (ici le début (ou la fin) d’un plan panoramique formidable
) et puis et puis elle parvient au Siam, hébergée par un riche latifundiste épris d’elle – à moins que ce ne soit qu’un homme d’affaires – et puis
l’histoire continue – je crois qu’on en revient un peu à lui
un peu de divination, beaucoup d’images des rêves
des merveilles qu’on ne verra pas ici, mais dans le film la cueillette des fleurs de lotus, ou celle des bambous – des merveilles qui tournent, pas autour du monde, mais en Asie, en un grand tour – tout au long de ces plus de deux heures qu’il dure, et qui passent comme un rêve
Grand Tour un film franco-portugo-italien réalisé par Miguel Gomes
Nous avons des pistes à brouiller. Il le faut. Il faut oublier, gommer, éloigner, distancier. Repeindre, mais avant ça nettoyer le support, eau lessive - rincer - attendre que ça sèche, reconstruire, attendre encore, poncer, attendre encore - peindre - oublier oublier
Il en est des toponymes comme du reste du monde : à Paris, la rue du Corbeau s'est transformée après guerre (la deuxième, mondiale, celle dont il est question ici) (mais sois sans inquiétude, ça continue : ça reste, comment disent-ils déjà ? oui, de moyenne intensité je crois bien) en d'abord rue Jean Moinon : il s'agissait là d'un résistant - on s'enquit que sa femme aussi, résistante aussi bien, déportée, assassinée tout autant, plus sans doute - peu importe mais la mémoire ? alors on transforma - les deux époux tenaient un café restaurant au 19 de la rue du Buisson-Saint-Louis - dans le 10, à deux pas (un peu plus) - lui d'abord tu remarqueras (et la galanterie ? je ne sais pas) (je m'éloigne, pardon mais ça n'est pas sans rapport) non, on travaille le cinéma : il y a dans ce film le dispositif qui prime. On pose des acteurs dans un décor - et des actrices - et les caméras tournent. On enregistre, on dérushe on monte. Une espèce de loft (tu te souviens, le loft vers deux mille ?). Ce n'est pas innocent. Un peu plus tragique, juste
Texte déjà publié en l'atelier d'écriture de François Bon (qu'on remercie) sous l'écopoétique #3 - illustré ici
C’est juste un jardin, un grand jardin ça n’a rien non plus de tellement exceptionnel, ça se passe dans les années quarante du vingtième siècle de cette ère dit-on (ça ne veut rien dire sinon que c’est un moment à partir duquel on commence à compter – avant, avant ça ne compte pas tu comprends) il s’agit d’une famille un peu comme les autres (ça ne veut rien dire non plus mais c’est pour fixer les idées comme on dit : une femme et son mari et leurs enfants – dans cet ordre), il y a donc
le mari qui a un bon poste, la femme la mère qui aime bien son jardin
et les trois enfants qui se chamaillent – tout est normalement constitué – le jardin fleurit au printemps, la mère a donné naissance
à un petit être : au vrai le jardin est étendu et un peu plus loin, dans cet intérieur à l’extérieur, derrière un des murs qui le ceint
il y a même une piscine,
pour que les enfants en été
s’amusent – il est vrai aussi que l’hiver
sous ces latitudes est assez sévère, mais la mère de famille aime cet endroit, sa maison est magnifique, grande spacieuse confortable décorée de jolis rideaux et de beaux meubles, elle l’aime quand même une rumeur serait, derrière ces murs, persistante, elle l’aime tant que lorsque, comme souvent dans ces postes disons à responsabilité les êtres (on les appelle des cadres) sont déplacés pour faire preuve de subordination envers un employeur qui a confiance en eux (on dit aujourd’hui de ce genre de mœurs « avoir l’esprit corporate » on dit comme ça, ça veut dire la même chose mais les circonstances et les conditions sont un peu différentes cependant) (l’esprit reste le même) les êtres sont déplacés disais-je et le mari est promu
(il s’agit d’une promotion, souvent : ça ne se refuse pas, on gagne plus on s’en va mais on gagne plus on a plus de responsabilités
et plus d’autres sous ses ordres – il part à Berlin – des ordres qu’on peut alors faire appliquer à la lettre à ses subordonné.es) et la mère des enfants refuse de partir, de quitter sa maison, magnifique, et son jardin qu’elle a investi d’un amour assez immodéré (heureusement, elle peut faire appel à des ouvriers pour l’aider)
(ils peuvent dans des brouettes transporter des ordures) : la hiérarchie du mari trouve le travail de celui-ci à la hauteur des attentes bien comprises, de chacun des côtés, ce qu’elle avait placé en lui, très bien, et il monte encore dans la hiérarchie bien que ne vivant plus guère dans cette si jolie maison –
mais il reviendra, bien sûr – alors, sa femme invite sa mère à venir, voir comment elle a réussi – enfin par mari interposé c’est vrai : des bijoux, des beaux tissus, des vêtements de prix – et en effet, sa mère est ébahie par tant de richesses et de réussite, il y a bien quelque chose dans les bruits qu’on entend au loin, il y a quelque chose, d’inquiétant ? d’étrange ? – une merveille que cette maison pourtant, et ce repas, et ces enfants, une merveille et montant se coucher dans la chambre d’ami.es, elle s’endort pour de beaux rêves. Il fait nuit, mais elle n’est pas noire Alors, se levant, tirant un peu le rideau occultant, il y a comme une nimbe, orangée mais qu’on ne discerne que mal, lointaine, derrière la maison, au loin Aussi, parfois quelque chose comme une fragrance Le lendemain, la mère s’en va. Et sa fille cependant heureuse, toujours, heureuse, attend le retour de son mari, au jardin poussent des fleurs aux couleurs vives et gaies
la question, ou le problème ou la suite c’est : qu’est-elle devenue ? et leurs enfants
quel est leur avenir
sur La Zone d’intérêt (Jonathan Glazer, 2023) grand prix Festival de Cannes 2023, prix Fipresci (à égalité avec Les Colons (Felipe Galvez, 2023) et Levante (Lillah Halla, 2023)) décerné par la critique cinématographique internationale – inspiré (de loin) du livre homonyme de Martin Amis – lui-même romançant la vie de Rudolf Höss commandant du centre de mort d’Auschwitz (aka Oświęcim de nos jours) . Dans le role de la femme du du commandant du centre, Sandra Hüller; dans celui du commandant Christian Friedel
il s’agit d’une histoire à rebours comme on en voit dans les contes – quelque chose débute dans la nuit : on ne s’aime plus pas grand chose mais juste : c’est fini hein on en est d’accord et On ne s’aime plus, vraiment ?
pourquoi ne pas en faire une fête ?
Ici Ale (Itsaso Arana, qu’on vit déjà dans le magnifique Eva en août du même réalisateur (2020))
et là Alex (Vito Sanz, parfait également – co-scénariste)
il est acteur, elle est réalisatrice – de cinéma – ils forment un couple depuis une quinzaine d’années (il joue dans ses films, elle le filme jouer) (la fiction ? la réalité ?) (il peint aussi :
elle évidemment)
le conte les prend, les images se muent en faux raccords ou en mosaïques
ils se séparent – elle s’en va,
ou alors ce sera lui
ils expliquent cela à leurs amis, ici au bar
là au restaurant : ça peut paraître incroyable
ou tout simplement géniaaaal
en réalité (si ça peut exister au cinéma), l’idée de la fête de séparation (qui m’a furieusement fait penser à ces affects décomplexés de nos jours contemporains) vient d’une galéjade du père d’Ale
ici à droite en peignoir qu’on ne le verra pas quitter (il est joué par Fernando Trueba, le père du réalisateur, Jonas Trueba – une histoire de famille : l’oncle David du réalisateur est producteur – le frère de son père) (oui enfin passons) – « ce serait mieux, disait-il ce père un jour où, probablement il avait abusé de la dive bouteille, de fêter les séparations que les mariages » – ou alors les deux – il est pris au mot – on fêtera cette séparation un 22 septembre : je me souviens de la chanson qui faisait
un vingt-deux septembre au diable vous partîtes et depuis chaque année à la date susdite….
que je chantais dans le métro Palais Royal (je m’égare)
je mouillais mon mouchoir en souvenir de vous
chantait le bon Georges – le poète, l’ami (les meilleures leçons de vie apprises le furent par ses chansons – je l’aime toujours, comme ma grand-mère) (pardon car c’est une chanson triste – elle se termine par
et c’est triste de n’être plus triste sans vous »)
(elle est un peu citée dans le film) on fêtera donc ça
en chanson pourquoi pas – on fêtera, on chantera on dansera – et puis
et puis
et puis
Septembre sans attendre un film (drôle, attachant, plein d’espoir) de Jonas Trueba
C’est un premier film (long métrage, un premier) et c’est à ce titre sans doute qu’on en dit quelque chose : on l’a vu à Romainville au Trianon – une salle de la banlieue de Paris nouvellement reliée à la ville dite intra muros par le métro (Châtelet-Rosny-Bois-Perrier dit la ligne – onze dit la wtf régie) et le réalisateur en parlait après la séance (on n’est pas restés, on avait faim) – il y avait dans l’entrée une table garnie de spécialités culinaires libanaises (j’ai acheté un petit paquet de zaatar que j’ai donné ensuite à ma fille comédienne). Cela n’aurait qu’une importance anecdotique et relative (mais les détails et les anecdotes sont l’un des sels de la vie) si l’époque n’avait pas cette puanteur (due à cette extrême droite dégueulasse – permettre et pousser à tuer des avocats en donnant leurs noms et leurs adresses, permettre et oser faire craindre des balles dans la nuque à d’autres corporations, la grande classe comme on voit : c’est ici, dans ce beau pays – celui des libertés). Donc, on sait grâce à ce cinéma de faire une place à celles et ceux qui décidément seront de plus en plus nombreux : et ici et ailleurs, j’ai nommé les étrangers… Et justement voilà que notre héros (Sofiane, dit Souf par ses relations) qui jouit d’une vie assez dissolue se trouve rattrapé par une OQTF (obligation de quitter le territoire français) cette infamie directement inspirée de l’idéologie de cette extrême droite odieuse . Souf est ennuyé : il n’est pas français… mais une solution pour rester sur le territoire dit national (ainsi qu’un front, qu’un rassemblement ou qu’une révolution, le tout de mémoire abjecte) consisterait à trouver un contrat de travail à durée indéterminée – la nation est un concept assez frelaté, je reconnais – ne parlons pas de la patrie, steuplé. On en parle, et il trouve à s’employer comme croque-mort : une relation paternelle (lequel est diplomate), on l’engage, vient mon ami lui dit-on : il était à Lyon, il déménage à Roubaix. Croque -mort cependant d’un genre particulier : musulman. Et voilà Sofiane qui rencontre le Hadj (Kader Affack, taiseux…)
lequel lui apprend un métier que Souf (Hamza Meziani, tout à fait convaincant) n’a aucunement l’intention d’embrasser. Nettoyer les corps morts a quelque chose de certainement assez particulier
ainsi qu’une ambiance difficile à supporter. Nécessité fait loi. Voilà Souf installé, et qui s’en va laver son linge
assez saisi par son nouveau métier (il voit des mort.es partout) mais celle-ci est bien vivante
Rachel (Magdalena Laubisch, sensible)
: coup de foudre sans doute – tout est plus compliqué cependant – mais le film va son chemin – Sofiane parcourt un chemin, commence sans doute à comprendre – Hadj est muet se tait et fait le travail : Sofiane apprend. Comprend sans doute, ce qui se fait sans un mot.
Quand même Sofiane ne serait pas musulman : quelque chose qui n’a, tout simplement, aucune importance. Des choses avec sa famille, d’autres avec Rachel : Sofiane sans doute troublé, tourneboulé, ballotté mais retrouvant son prénom… – ici en visite
à la mosquée, Rachel qui trouve cela exotique, sans doute
le film bifurque : voilà Sofiane s’en allant à Nice tenir une officine : liturgie
nombreux rituels et puis et puis… Le film suit son chemin, comme Sofiane le sien. Une sorte d’initiation diaphane – à peine forcée – mais des valeurs, une humanité, des propos, des acteurs et des actrices tout à fait à la hauteur.
Six pieds sur terre un (premier long métrage) film réalisé par Karim Bensalah